Archives expositions personnelles (L)

L’art qui dialogue avec l’environnement

Le dessin qu’en a tiré l’artiste, qui en retrace les flux, vient s’amplifier par multiplication et agrandissements croissants, pour submerger la galerie et ses visiteurs, au sein d’une installation pénétrable car pénétrante, entre flots sous-marins et falaise écumeuse, éruption volcanique et grotte mystérieuse, nuage de cendres et émergence d’une architectonique, au risque de sa disparition. Par cette stratification de temps et d’espaces, l’œuvre est mise en scène d’une mise en cendre, distanciation d’une incandescence, dramatique et critique, catastrophe et existence.


Extraits de notes prises par l’artiste lors de sa résidence à la pointe du Dourven


« La petite maison qui tient ferme. Existe - résiste - insiste. Assez carrée, comme rentrée au-dedans. Au milieu du monde, tempétueux. Qui dit l’existence. Cette petite maison sur la presqu’île, d’où j’ai vécu la tempête externe. Entre forme (maison) et flux (dessin autour). « Contient » les flux et résiste ferme. Méta-installation, au dedans. Image de l’archi-galerie, qui tient encore dans sa submersion. Plafond net, droit, épuré. Le dehors matiériste. La lave qui pourrait refluer, passé-devenir, permanence à grande échelle. […]

Un décor de théâtre, sans personnage. Le lieu est son propre drame.

De la même manière que la tempête arrachante de 2008 a aussi révélé des strates archéologiques fécondes, soulever les murs lisses de la galerie pour mettre à jour des feuilletages géologiques anciens, l’irruption de la lave. […]

Là où les strates ne sont pas que délitement mais dévoilement de couches, fonds sous-jacents. […] Destructeur-révélateur] Pointes du vent. Strates soulèvement. […]

De la pierre de lave, dure, aux flux vifs du magma. Rentrer comme à l’intérieur d’une poche magmatique. Devenir lave ou granit. »


Anaïs Lelièvre travaille toujours à partir d’un dessin de petit format, qu’elle retravaille par multiplication numérique avec rétrécissements et agrandissements successifs. Le dessin-matrice est ainsi mis en croissance jusqu’à sa décomposiion, pour générer d’autres dessins venant constituer un environnement immersif. Tout en renversant les repères orthonormés du lieu existant, ces installations en transcrivent les mouvements et tensions, organique ou architectural, entre germination, effondrement et construction.

Le processus excède souvent la production d’une seule installation et trouve sa suite dans plusieurs espaces, où le même dessin évolue, se stratifie des résidences récemment vécues, et se reconfigure selon le nouveau site. Tout en développant une approche contextuelle très ancrée. Ainsi l’ailleurs se poursuit ici puis en pointillé encore ailleurs, et découvre des résonances d’un espace à l’autre.


La Galerie du Dourven est un espace de création et d’exposition dédié à l’art contemporain. Située dans le domaine départemental du Dourven, un espace naturel sensible exceptionnel de 43 ha reposant sur une pointe rocheuse du littoral de Trédrez-Locquémeau, à l’embouchure de la baie de Lannion, elle met à l’honneur des projets individuels ou collectifs d’artistes plasticiens actuels, confirmés ou jeunes créateurs, autour de la notion de Paysage. Après l’arrêt de l’activité de l’association Itinéraires Bis, en 2018 Lannion-Trégor Communauté a décidé de refaire vivre le lieu de manière pérenne, en mettant en œuvre un projet artistique et culturel voué à renforcer la présence des arts plastiques et de la création contemporaine sur le territoire.


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Communiqué de presse


Anaïs Lelièvre a découvert la pointe du Dourven en décembre dernier, et l’a habitée en pleine tempête. La maison est devenue un rempart contre les éléments, un lieu de résistance à la fois fort et fragile. Lors de sa résidence, l’artiste a exploré la presqu’île en marches erratiques jusqu’à en venir à explorer son passé géologique, archéologique et architectural. La géologue Odile Guérin lui a transmis le récit de la formation du site il y a environ 600 millions d’années lors d’une intense activté magmatique qui a produit les granites entre l’île de Bréhat et Perros-Guirec, et des laves entre Locquémeau et Paimpol, dont les entrailles - après des millénaires d’érosion - sont toujours très visibles à Locquémeau.


Au regard des strates volcaniques qui précèdent l’intrusion du granit à la pointe du Dourven, l’artiste a prélevé une pierre de lave. Trouvé au niveau de l’ancien site archéologique recouvert à la pointe de Séhar, ce témoin de processus à grande échelle spatiale et temporelle permet de se projeter imaginairement dans le paysage passé du Dourven (autant que dans ses devenirs fantasmés si des volcans venaient à se reformer). Par son relief pointu, dessiné de face, ce roc extrait apparaît comme une figure insulaire, un fragment à l’image de son contexte : d’entre leurs strates, s’entrelacent le caillou et la montagne, le petit et le grand. Ce schiste de cendres magmatiques, composé et brisé, solide et érodé, contient en ses lignes résiduelles les restes d’une histoire très lointaine.
































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Anaïs Lelièvre, Cinis
Galerie du Dourven, Trédrez-Locquémeau
10.07 - 03.10.2021

Piero Livio, Dustmuseum, Maison Européenne de la Photographie, Paris

© ArtCatalyse / Marika Prévosto 2014. Tous droits réservés

Exposition du 10 juillet au 3 octobre 2021.  Galerie du Dourven, allée du Dourven - 22300 Trédrez-Locquémeau. Tél.: +33 (0)2 96 05 92 52. Ouverture du mercredi au dimanche de 14h à 18h30 et à partir du 1er septembre du samedi au dimanche de 14h à 18h30.